La vie spirituelle des vietnamiens, hier comme aujourd’hui, est façonnée par l’influence croisée de plusieurs croyances et religions : culte des ancêtres, bouddhisme, confucianisme, taoïste, christianisme, islam. Au lendemain d’une domination chinoise de plus de mille ans (179 AC - 938 AD), les premières dynasties nationales (10ème- 14ème siècle) ont favorisé l’épanouissement du bouddhisme, tout en jetant les bases d’une éducation nationale axée sur le confucianisme. C’est à partir du 15ème siècle que ce dernier a pu, grâce aux profonds bouleversements agraires et sociaux, l’emporter sur le bouddhisme jusqu’à lors considéré comme religion nationale et marquer de son empreinte la société méd
Christianisme au Vietnam
Si importé de l’Occident à partir du 18ème siècle n’a pas réussi à s’implanter au Vietnam comme religion nationale, c’est parce qu’il lui manque la tolérance des trois religions fondamentales. Elle supprimait toutes les divinités païennes, et interdisait le culte des ancêtres si cher au coeur de la population
Mais le christianisme n’est pas pour autant refusé, bien au contraire. Dans ce pays ravagé pendant des siècles par les guerres, on assiste à une véritable coexistence pacifique des religions qui ne se nient pas mais qui se complètent.
Le culte des ancêtres au Vietnam
Le culte des ancêtres est le trait le plus saillant de la vie spirituelle vietnamienne. Il est pratiqué dans tout le pays et par tous les Vietnamiens, quelle que soit leur appartenance sociale ou leur idéologie politique.
La philosophie du culte des ancêtres
Le but du culte des ancêtres est de perpétuer un complexe émotionnel aussi intense que possible, liant d’une façon indissoluble les vivants et les morts d’un même clan. Il a pour objet l’entretien des tombes, mais surtout le culte qui doit être rendu dans le temple familial aux tablettes des quatre générations ascendantes : trisaïeul et sa femme, bisaïeul et sa femme, aïeul et aïeule, père et mère. Au fur et à mesure, on enterre les tablettes des générations les plus vieilles sous le sol du temple.
L’autel des ancêtres peut occuper toute une pièce dans les grandes maisons ou la travée principale dans les maisons de campagne, mais en tout cas le cœur du foyer. C’est généralement une planche fixée au mur ou une table assez haute où sont déposées les photos de morts, un ou plusieurs bols pour baguettes d’encens, deux chandeliers, parfois un petit brûle-parfums.
Dans l’esprit des vietnamiens, il n’y a pas de séparation entre le monde des vivants et celui des morts. Ainsi, même un ascendant décédé il y a des siècles hante toujours l’autel des ancêtres, revient parmi les vivants aux jours de fêtes et aux anniversaires de sa mort. Il suit ses descendants dans leur vie quotidienne et est capable d’être au courant de ce que font ces derniers. Il partage ainsi leurs peines et leurs joies, il est malheureux quand leurs descendants font du mal, il est fier quand ceux-ci font du bien. C’est ainsi que les Vietnamiens sacrifient à leurs feux ascendants à l’occasion de tous les grands événements de la famille : naissance d’un enfant, début des études d’un garçon, réussite à l’examen, fiançailles, mariage, deuil, grand voyage...On leur envoie tous les conforts de la vie terrestre, en brûlant à leur intention des objets votifs en papier : vêtements, chapeau, armoire, lit, voiture, moto et même des dollars américains, en faux bien entendu...
Pour que le culte des ancêtres puisse être dignement célébré, on réserve dans le patrimoine du clan une part dite de l’encens et du feu dont l’héritier a l’usufruit.
Dans la famille, le culte des parents décédés est généralement assumé par les fils, et notamment le fils aîné. Les filles ne sont autorisées à s’occuper de l’autel des ancêtres que si elles n’ont pas de frères. C’est ainsi que les vietnamiens, encouragés par la loi à faire deux enfants au maximum, préfèrent avoir deux fils que deux filles, deux enfants de sexe opposé étant idéal. C’est ainsi aussi que beaucoup de vietnamiens se divorcent, ou se laissent tentés par l’adultère, dans cet effort de laisser après leur mort, un homme pour s’occuper de leur âme et perpétuer leur souvenir.
Si quelqu’un meurt sans laisser de descendants, il n’aura pas d’autel pour revenir parmi les vivants et son âme sera condamnée à une errance éternelle. La plus grande malédiction pour un vietnamien est donc de mourir sans laisser d’enfants. La solution dans ce cas est d’adopter un enfant ou bien faire don de son patrimoine à des pagodes bouddhiques, à des temples communaux qui assureront en contrepartie son culte posthume.
Car ce n’est pas seulement la mort mais également le rituel qui ouvre le chemin à la vie future. Le rituel seul et non la mort peut constituer le transfert de vie ou de puissance dont le mort a besoin. Grâce au rituel, le Vietnam croit aux morts, tandis que l’Occident ne croit qu’à la Mort.
Le bouddhisme au Vietnam
Le bouddhisme est largement défini non pas comme une religion mais plutôt comme une philosophie orientale, fondée en Inde par Siddhârta Gautama (vers 560-483 av. J.-C.), prince de la tribu des Sakya, connu sous le nom de Bouddha "l'Illuminé". Le but de cette philosophie est de sortir du cycle des réincarnations et accéder au nirvana (affranchissement éternel de la succession d'épreuves qu'est la vie terrestre).
La philosophie du bouddhisme
Le bouddhisme tient davantage de l'éthique que de la religion. Il s'agit en fait de supprimer les désirs tentateurs (désir d’exister, de plaire, de posséder ...), qui sont à l’origine de la souffrance universelle, pour atteindre le nirvana (vérité absolue et délivrance totale) et par là-même devenir Bouddha ("l'éveil"). On peut l'atteindre lorsque l'on a reçu l'illumination parfaite en suivant le chemin du juste : vue juste, pensée juste, langage juste, action juste, existence juste, pratique juste, volonté juste et méditation juste. Deux croyances fondamentales organisent la philosophie du bouddhisme : tous les êtres vivants se réincarnent un nombre indéfini de fois ; le déroulement de chaque vie est prévu selon les actions accomplies dans la vie précédente.
Selon le bouddhisme, tout est transitoire. Il y a un commencement, une durée et une fin. Par conséquent, il n'existe pas, pour les bouddhistes, de Dieu créateur et éternel.
Le bouddhisme aurait été introduit au Vietnam dès le début de notre ère (vers la fin du deuxième siècle) tant par la voie maritime - le bouddhisme venu du Sud ou le « Petit véhicule » - que par la voie terrestre - le bouddhisme venu du Nord ou le « Grand véhicule ».
Le bouddhisme a connu son apogée au Vietnam du 12ème au 14ème siècle, sous les dynasties des Ly et des Tran qui l’ont porté au rang de religion nationale. Bouddhisme et politique s’immisçait alors, plusieurs bonzes participant à la vie politique et plusieurs monarques étant bonzes. La pagode était devenue le centre culturel des communautés villageoises, les bonzes jouaient en même temps le rôle d’instituteur.
A partir du 15ème siècle, le bouddhisme céda sa place au confucianisme au niveau de la superstructure sociale. Il quitta la Cour mais reste ancré dans les villages, où les pagodes constituent toujours le point de repère de la vie spirituelle de la population.
Le bouddhisme a joué un rôle très important pendant les guerres de résistance, par sa conception hostile aux agressions. Il est donc de notre jour soutenu politiquement, contrairement à ce que disent souvent les observateurs mal informés qui prétendent qu’il est réprimé.
Quelques citations de Bouddha
Entre le ciel et la terre, il n'y a qu'une demeure temporaire.
Il y a plus de larmes versées sur la terre qu'il n'y a d'eau dans l'océan.
Les nuages ne disparaissent pas, ils se transforment en pluie.
Il ne faut jamais blâmer la croyance des autres, c'est ainsi que l'on ne fait de tort à personne. Il y a même des circonstances où l'on doit honorer en autrui la croyance qu'on ne partage pas.
Puisque la haine ne cessera jamais avec la haine, la haine cessera avec l'amour.
Tout est faux et vrai à la fois: tel est le vrai caractère de la loi.
Le temps est un grand maître; le malheur, c'est qu'il tue ses élèves.
Une conscience troublée par les désirs ne peut se librérer; et une sagesse troublée par l'ignorance ne peut se développer.
Ne croyez pas les individus, fiez-vous aux enseignements; ne croyez pas les mots, fiez-vous au sens ultime; ne croyez pas l'intellect, fiez-vous à la sagesse.
Le confucianisme au vietnam
La philosophie du confucianisme
Tout comme le bouddhisme, le confucianisme n’est pas une religion au sens strict du mot, mais plutôt une philosophie morale, fondée par Confucius (551-479 av.JC), qui ne se préoccupe ni des origines du monde, ni des fins invraisemblables de l’homme dans l’au-delà. Le confucianisme préconise un modèle d'homme, le ''junzi", modèle de sagesse et de vertu individuelle, fondé sur la bienveillance et la correction morale, l'humanisme, l'amour de son prochain.
La préoccupation centrale du confucianisme est de remédier aux désordres sociaux causés par la cupidité de l’homme et par son désir de réussite sociale. La solution proposée par Confucius est de construire une société paisible et stable soumise à un souverain, à l’immage d’une famille bien hiérarchisée autour du père.
Le souverain est au sommet de toutes les hiérarchies. Il est le fils du Ciel et le père de tous ses sujets. Le souverain doit se comporter envers ses sujets en bon père de famille : il doit les aimer, les protéger et les éduquer. En revanche, le peuple doit être soumis et reconnaissant envers le souverain.
Quelques citations de Cufucius
"L'ouvrier qui veut bien faire son travail doit commencer par aiguiser ses instruments."
"Il faut que le disciple de la sagesse ait le coeur grand et courageux. Le fardeau est lourd et le voyage est long.
"Dépasser les limites n'est pas un moindre défaut que de rester en deçà."
"L'expéricence est une bougie qui n'éclaire que celui qui la porte".
"Un mot perd l'affaire, un homme détermine le sort d'un empire".
"Le père qui n'enseigne pas ses devoirs à son fils est autant coupable que ce dernier s'il les néglige".
"Celui qui plante la vertu ne doit pas oublier de l'arroser souvent".
"Pas trop d'isolement, pas trop de relations, le juste milieu, voilà la sagesse".
"La vie de l'homme dépend de sa volonté; sans volonté, elle sera abandonnée au hasard".
Le taoïsme au Vietnam
Le taoïsme (Lao Giao ou Dao Giao) est né en Chine. On le doit à Lao Tseu (Laozi) ou Thai Thuong Lao Quan, surnom qui signifie, littéralement, le Vieux Sage. Ce philosophe aurait vécu au VI e siècle av.J-C.,mais son existence est mise en doute. L’Histoire veut pourtant que Confucius en personne ait aimé consulter ce gardien des archives impériales.
La philosophie du taoïsme
Il est peu problable que Lao Tseu ait tenté de faire de sa philosophie une religion. On attribue à Chang Long la responsabilité de l’avoir officiellement déclarée religion en 143 a. J-C. Plus tard, le taoïsme s’est divisé deux, le culte des Immortels et la Voie du professeur divin.
Comprendre le taoïsme n’a rien de facile. Cette philosophie préconise la contemplation et la vie simple. Son idéal set de revenir au Tao (La Voie, le pricipe de l’univers). Seule une élite, tant en Chine qu’au Vietnam, a été capable de saisir une telle philosophie, fondée sur plusieurs correspondances (Par exemple le corps humain, réplique microcosmique du macrocosme) et sur le am et le duong, équivalents vienamiens du yin et du yang. Pour cette raison, le Vietnam compte peu de pagodes proprement taoïstes, l”essentiel de ce rituel étant absorbé par le bouddhisme chinois et vietnamien. L’influence taoïste que vous remarquerez sans doute en architecture, consiste à utiliser des dragons et des démons pour décorer les toits des temples.
Selon la cosmologie taoïste
Ngoc Hoang, l’empereur de Jade, dont la demeure est dans les cieux, dirige un monde de divinités, de génies, d’esprit et de démons dans lequel les forces de la nature sont incarnées par des êtres surnaturels et de grands personnages historiques divinisés. Cet aspect du taoïsme fait partie de la vie quotidienne des Vietnamiens sous la forme de superstitions et de croyances mystiques et animistes. Nombre des pratiques de sorcellerie et de maigie, dont se nourrit aujourd’hui la religion populaire, tirent leur origine du taoïsme.
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